Retour au bureau, vers la fin du télétravail ?

Depuis 2020 et les différents confinements, le télétravail a progressé à pas de géant dans les entreprises et les organisations. Mais face aux diverses problématiques engendrées par ce changement majeur, de nombreuses structures remettent plus ou moins en cause cette généralisation et envisagent même la fin du télétravail. Et les conséquences s’avèrent importantes en termes d’organisation du travail comme d’aménagement des espaces.

Les réalités multiples du télétravail 

De plus en plus répandu, le télétravail a fait l’objet, en 2022, de 10 fois plus d’accords d’entreprise qu’en 2017. Encadré par la loi du 26 novembre 2020, il doit désormais être “ mis en place dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, dans le cadre d’une charte élaborée par l’employeur après avis du comité social et économique, s’il existe. En l’absence d’accord collectif ou de charte, la mise en place du télétravail est possible par accord de gré à gré entre le salarié et l’employeur”. Cet accord doit être inclus dans le contrat de travail ou faire l’objet d’un avenant au contrat. 

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Obligations de l’employeur en matière de télétravail 

Chaque employeur doit préciser les conditions de mise en place du télétravail au sein de sa structure. Ainsi les horaires, les moyens de contrôle précisent l’organisation cible. Les équipements nécessaires, en matériel et en connexion, doivent également être fournis par l’employeur.  Par ailleurs, chaque salarié bénéficie en France d’un droit à la déconnexion, afin d’éviter les dérives en termes d’horaires et de charge de travail, au risque d’accélérer la fin du télétravail. 

Organisation du télétravail, un casse tête pour les entreprises 

En 2023, en France et ailleurs, le télétravail revêt des réalités très diverses : 

  •  Libre, il offre une véritable flexibilité au collaborateur mais nécessite une organisation rigoureuse pour préserver l’équilibre des services et des équipes
  • 2 ou 3 jours de télétravail par semaine. Une question importante pour les structures qui doivent mesurer les impacts en termes d’occupation et d’organisation des espaces de travail 
  • Lundi et vendredi. Mettre en place cette modalité suppose une confiance totale entre salarié et employeur, qui peut craindre les week-ends prolongés
  • Forfait mensuel, il permet aux collaborateurs de travailler à distance une semaine entière, voire ailleurs que chez eux. Une disposition qui nécessite beaucoup d’organisation pour rassembler les équipes
  • Forfait annuel. Cette mesure permet aux collaborateurs de travailler de chez eux pendant plusieurs semaines consécutives mais exclut les réunions physiques et implique de disposer des outils de travail mobiles nécessaires. 

Conséquences du télétravail, un bilan mitigé 

Comme toute révolution dans l’organisation du travail, la généralisation du télétravail produit des effets pour les entreprises et leurs collaborateurs. Avec plusieurs années de recul,  certains enseignements peuvent être tirés qui pourraient entraîner le fin du télétravail. Ils s’appuient sur les résultats d’une mise en place contrainte en 2020, puis plus ou moins choisie depuis la fin des confinements. 

  • Des aspects positifs incontestables 

    • Équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Pour les habitants des métropoles, et en particulier en région parisienne, le télétravail évite de longs trajets entreprise/domicile. Il permet donc de limiter la fatigue et de gagner du temps. Sans oublier la possibilité de mieux conjuguer obligations professionnelles et personnelles. 
    • Productivité. Selon leurs missions et leurs profils, certains collaborateurs s’avèrent plus productifs en télétravail, partiel ou total. 
    • Réduction des coûts. Pour les entreprises, le télétravail permet de réorganiser les postes de travail et les espaces, en flex office et open spaces. Les frais de déplacement peuvent également être réduits. 
    • Adaptabilité. Pour les entreprises, disposer d’espaces modulables permet de s’adapter aux fluctuations des marchés. Et donner la possibilité aux salariés de travailler dans d’autres lieux favorise leur adaptation aux changements divers.
    • Attractivité. Le télétravail est aujourd’hui un élément important pour séduire les candidats. Ainsi, les postes uniquement sur site se révèlent moins attractifs que les autres. Au point que 80% des offres sans candidature concernent des postes fixes en entreprise. 

Des aspects négatifs en progression 

  • Inégalités. Le télétravail ne concerne pas tous les salariés. Et parmi ceux qui sont concernés, certains ne disposent pas d’un environnement de travail adapté à leur domicile. 
  • Organisation. Pour les entreprises, le télétravail représente un défi d’organisation, pour réunir les équipes notamment. 
  • Sécurité des données. Autoriser le travail à distance représente des risques pour les données des entreprises et la confidentialité. Cela nécessite donc des moyens informatiques et digitaux conséquents. 
  • Problématiques de santé. Sédentarité et manque d’équipements suffisants accompagnent parfois le télétravail. Des postes et des espaces mal adaptés entraînent des maux divers. 
  • Risques psychosociaux. Isolement, perte du sentiment d’appartenance et démotivation se développent parfois avec le télétravail. S’ajoutent la gestion de la charge de travail, la complexification des interactions, le manque de soutien perçu et le contrôle à distance des actions et des résultats.
  • L’ensemble de ces facteurs pourraient engendrer la fin du télétravail. 

Retour au bureau ou travail hybride ? 

Comme toute tendance, celle du télétravail provoque d’abord un engouement puis une remise en question. Ainsi, aux États-Unis, les confinements ont entraîné un développement massif du télétravail. De très nombreux salariés ont pratiqué le “full remote” et ont même déménagé très loin de leur entreprise, avec l’accord de celle-ci. 

Pour autant, 2023 s’avère l’année du retour de balancier outre Atlantique. Et de très nombreuses grandes entreprises ont mis fin à cette pratique. Amazon, Disney, Google, Zoom, les GAFAM et autres majors incitent fortement leurs collaborateurs à retourner au bureau et signent la fin du télétravail. Une nouvelle tendance se développe donc, celle du RTO, “Return to office”, confirmé par 90% des entreprises à horizon 2024.   

Travail hybride, la solution ultime ? 

Selon l’OCDE, Organisation de Coopération et de Développement Économique, la productivité des salariés est maximale avec un ou deux jours de télétravail. Au-delà de ce seuil, elle tend à baisser. De fait, en France, les entreprises n’ont guère adopté le télétravail total mais plutôt une version modulable. Et pour de multiples raisons, elles n’envisagent pas un retour au présentiel total. En effet, nombre d’entre elles ont adapté la taille de leurs bureaux en fonction d’un taux de présence moyen. Les économies réalisées, surtout en région parisienne et les avantages du télétravail partiel excluent donc un retour en arrière.

Nudge et FOMO au secours de l’organisation du travail 

Faire coïncider les besoins et attentes des collaborateurs avec ceux de leur entreprise se complexifie aujourd’hui avec les enjeux liés au télétravail. D’autant qu’une étude récente montre que 64% des salariés pourraient quitter leur emploi si on les obligeait à revenir au bureau à temps plein. En termes d’attractivité comme de fidélisation, le télétravail et ses modalités deviennent donc une question majeure pour les entreprises. 

Dans ce contexte, les principes du nudge s’avèrent plus efficaces que la contrainte. Il s’agit de modifier le comportement par la suggestion, sans avoir recours à la contrainte. Mais quels en sont les objectifs ? 

  • Équilibrer la présence des collaborateurs au bureau pour optimiser l’occupation et l’aménagement des locaux 
  • Développer la cohésion et le travail en équipe pour améliorer les résultats, la réactivité et la créativité

Une présence désirée et désirable

Concrètement, le nudge entend rendre désirable la présence sur site, par des moyens divers. Créer des événements pour casser la routine, fixer des réunions régulières vient aider les organisations à moduler les jours de présence. Sans oublier de communiquer largement, grâce à tous les canaux disponibles. Les entreprises peuvent également s’appuyer sur la technique du FOMO, Fear of Missing Out ou peur de rater quelque chose, en créant des places limitées et des horaires précis. 

Gen Z et télétravail, une division existentielle 

Née après 1995, les membres de la Génération Z ou Gen Z exposent leurs aspirations professionnelles et préoccupent beaucoup les entreprises. Faire carrière ne ferait plus partie de leurs priorités et ils seraient ¼ à envisager de devenir travailleur indépendant. Très attachés à la notion d’équilibre entre vie privée et vie professionnelle, ils attendent des entreprises une réalité dans la mise en action des valeurs affichées

Retour au bureau modulable 

En matière d’organisation du travail, le télétravail partiel va de soi pour ces jeunes actifs. Pour autant, 79% d’entre eux attendent de leur employeur la mise à disposition d’un espace de travail physique, sans pour autant désirer la fin du télétravail. Et ils sont de plus en plus nombreux à refuser de se projeter dans un poste en télétravail total. Traumatisés par la période COVID et les confinements qui leur ont “volé” 2 ans de leur vie, ils aspirent à la relation et au contact humain direct. Problèmes d’intégration, de cohésion, de créativité ou encore de lien social, la pandémie a marqué son empreinte durable sur cette génération. Au point de cliver les adeptes de la solitude et des relations dématérialisées d’un côté et de l’autre les aspirants à la vie professionnelle basée sur les échanges directs, en présentiel.